Pourquoi le Classement Gartner des Top 25 Supply Chains Pose Problème
Lora Cecere a récemment ravivé un débat que beaucoup dans le secteur préfèrent éviter : les classements des meilleures supply chains sont-ils vraiment fiables, ou ne sont-ils qu’un exercice de communication bien orchestré ?
Dans une réponse tranchée à un post LinkedIn qui faisait la promotion du classement 2025 de Gartner, Cecere, fondatrice de Supply Chain Insights, a rappelé un point crucial : elle était présente lors de la création de ce classement il y a 20 ans. Et elle en contestait déjà la méthodologie. Sa critique ? Ces classements ignorent la comparaison entre pairs, se basent en partie sur des opinions subjectives, et récompensent trop souvent la perception au détriment de la performance réelle.
Une Réalité Masquée par le Branding
Cecere partage des données sans appel :
66 % des entreprises listées sous-performent leur groupe de pairs sur la croissance
48 % sur les rotations de stocks
38 % sur la marge opérationnelle
41 % sur le ROCE (Return on Capital Employed)
62 % sur la valorisation boursière
En d’autres termes, la majorité des entreprises célébrées comme des « modèles » ne tiennent pas la comparaison avec leurs concurrents directs. Alors pourquoi sont-elles glorifiées ? Parce qu’elles sont grandes, visibles, multinationales... et bien connectées ?
Des Commentaires Qui en Disent Long
La communauté LinkedIn n’a pas tardé à réagir. Voici quelques points saillants :
Lori Foster note qu’en tant que cliente finale d'une de ces entreprises, elle ne classerait jamais leur supply chain dans le Top 25.
Zaina Kadah appelle à dépasser les classements guidés par la perception pour se baser sur des données concrètes.
Ben Cook donne l'exemple d'Apple, soulignant leur agilité logistique exceptionnelle — un cas rare où réputation et performance se rejoignent.
Prince Dziwornu mentionne qu’il connaît des entreprises du Top 5 dont les sites opèrent toujours sur des systèmes obsolètes.
Srini Paruchuri critique l’exclusion de secteurs complexes comme l’automobile, qui gèrent pourtant certaines des supply chains les plus avancées.
Richard B. résume bien la situation : « La profession confond visibilité de marque et excellence opérationnelle. »
Le Problème du Benchmark Transsectoriel
Comparer une entreprise pharmaceutique avec un fabricant automobile ou une enseigne de la grande distribution n’a aucun sens sans ajuster les indicateurs selon les réalités sectorielles. Les marges, la rotation des stocks ou le ROCE n’ont pas la même signification ni la même amplitude d’amélioration dans chaque industrie. Ce manque de contextualisation fausse les résultats et renforce des biais existants.
Une Alternative Plus Crédible ?
Supply Chain Insights, l’organisation de Cecere, propose une autre approche avec son classement « Supply Chains to Admire ». Elle y compare les entreprises à leurs pairs, selon des critères quantitatifs et publics. Seules trois entreprises — Apple, Lenovo et L’Oréal — apparaissent à la fois dans ce classement et dans celui de Gartner. C’est un signal fort.
Ce Que Nous Devrions Évaluer à la Place
Plusieurs commentaires appellent à repenser les critères :
L’agilité réelle en période de volatilité
La capacité à aligner les opérations avec la stratégie d’entreprise
L'efficacité de la trésorerie et du capital
Le niveau de digitalisation de bout en bout
La responsabilité environnementale et sociale tangible, pas déclarative
Et si on évaluait aussi la qualité du leadership supply chain ? L’impact des décisions S&OP ? Le niveau de résilience systémique, et pas seulement la photo d’un trimestre ?
Gartner : Une Machine à Branding ?
De nombreux professionnels — y compris d’anciens insiders — remettent en cause la légitimité de Gartner. Comme le dit Andrew Tanner-Smith : « Gartner ne vend pas de l’expertise, il vend une marque. » C’est une critique que beaucoup partagent mais peu osent formuler publiquement.
Ce Que Cela Dit de Notre Industrie
Ce débat va bien au-delà d’un simple classement. Il questionne notre définition collective de l’excellence. Sommes-nous prêts à aller au-delà du vernis marketing pour réellement valoriser ce qui fonctionne ? Ou allons-nous continuer à récompenser la notoriété, au détriment de la substance ?
Et vous, qu’en pensez-vous ? Faut-il repenser complètement la façon dont nous évaluons les supply chains ?
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